Homélie 1er dimanche du Carême – année B
« Jésus fut tenté par Satan, et les anges le servaient » (Mc 1, 12-15)
Pas de Carême sans l’Esprit Saint.
Frères et Sœurs,
Avez-vous remarqué une chose très importante dans l’Évangile de ce dimanche… très court d’ailleurs ! Pourquoi Jésus va-t-il au désert ?
La première réponse pourrait être… parce qu’il y est déjà. En effet, il nous est dit que ce passage se situe juste après que Jésus venait d’être baptisé. Or ce baptême se passe là où Jean le Baptiste rassemblait ses disciples et les baptisait : au désert. Là où il avait choisi de vivre. Mais Jésus semble s’enfoncer encore plus au désert.
Pourquoi ? Simple promenade ? Un pèlerinage ? Peut-être d’ailleurs. Peut-être entame-t-il cette marche au désert comme ses ancêtres qui ont vécu quarante ans au désert, lente traversée du Peuple d’Israël vers la Terre Promise. 40 ans, 40 jours : la similitude des chiffres n’est pas un hasard. Elle dit l’enracinement de Jésus dans une histoire, celle d’un Peuple. Du Peuple juif, nos ainés dans la foi. Jésus va en être le pivot. Comme beaucoup, il se fait baptiser par Jean Baptiste. Mais son baptême révèle aussi qu’il est tout à fait unique, celui pour lequel Jean-Baptiste ne se juge pas digne de dénouer les lacets de ces sandales. Après le moment de grâce du baptême, voilà le baptême du feu avec le passage au désert, les tentations, la rencontre avec Satan. Pensez-vous que Jésus y soit allé de bonne grâce ? Non surement pas…
Une précision importante de l’Évangéliste nous dit : « aussitôt l’Esprit le pousse au désert ». Voilà très clairement exprimé la raison pour laquelle Jésus se livre à cette expérience : poussé par l’Esprit de Dieu. Guidé par l’Esprit. Éclairé par l’Esprit.
C’est une question compliquée que de savoir si Jésus savait à l’avance tout ce qui allait lui arriver… Elle est très débattue par les théologiens. Disons simplement ici qu’il ne savait sans doute à l’avance le menu du diner du soir ! Mais Il avait une conscience imminente de la mission qui était la sienne, du rôle particulier qu’il avait à jouer, sans en connaitre tous les détails. Aller au désert était assurément s’engager dans une épreuve. Il fallait donc qu’il soit porté par l’Esprit pour prendre ce chemin rude et décapant, mais nécessaire à l’accomplissement de sa mission sur terre. Tout comme il le sera encore sur le chemin ultime de la Croix.
Je veux mettre en avant cette action de l’Esprit dans la vie de Jésus pour la rapporter à notre propre vie. Si Jésus a besoin de l’action de l’Esprit pour lui, combien plus en avons-nous besoin pour vivre ce Carême qui commence. Il me semble important de le rappeler. Car qui dit Carême pense très vite effort. Effort de Carême ou privation. Moi, Olivier, je décide de faire tel ou tel effort. Peut-être… Mais suis-je bien sûr que cet effort décidé soit aussi celui que Dieu a choisi ? Que cela vienne de l’Esprit Saint et me fasse progresser sur le chemin de la sanctification ?
Pourquoi est-ce important de vérifier cela ? Car l’Esprit Saint est celui qui m’aide à faire ce qui me parait impossible. Passer 40 jours au désert, pour un être humain normal : impossible. Avec l’Esprit, cela devient possible. Me défaire de tel ou tel attachement en 40 jours : impossible. Avec l’Esprit Saint, cela devient possible ! Penser vivre le Carême sans Lui, c’est donc déjà un péché. C’est se croire capable de vivre sans Dieu. Ce n’est pas ce que vous voulez bien sûr.
Pour gagner l’entrainement du Carême, comme tout entrainement, il faut se dépasser. Mais difficile de se dépasser tout seul… On arrive vite à être découragé. Il nous faut un coach, un entraineur. L’entraineur de notre vie spirituelle, c’est l’Esprit Saint.
Dans son encyclique sur la Sainteté, le Pape François décrit bien ce qu’il nomme un ennemi à la sainteté. Il écrit :
- 49. Ceux qui épousent cette mentalité… font confiance uniquement à leurs propres forces. Certains … font … passer l’idée que tout est possible par la volonté humaine, comme si celle-ci était quelque chose de pur, de parfait, de tout-puissant, auquel s’ajoute la grâce. On cherche à ignorer que ‘‘tous ne peuvent pas tout’’[47], et qu’en cette vie les fragilités humaines ne sont pas complètement et définitivement guéries par la grâce[48]. De toute manière, comme l’enseignait saint Augustin, Dieu t’invite à faire ce que tu peux et à demander ce que tu ne peux pas [49]; ou bien à dire humblement au Seigneur : « Donne ce que tu commandes et commande ce que tu veux »[50].
- 50. Au fond, l’absence de la reconnaissance sincère, douloureuse et priante de nos limites est ce qui empêche la grâce de mieux agir en nous. »
Ainsi, au seuil de ce Carême nouveau, nous sommes invités, à nous remettre humblement devant Dieu. A nous présenter tel que nous sommes, sans forfanterie ou faux désir de gloire, à demander au Seigneur dans la prière : « donne-moi la grâce de faire Ta volonté ». Comme le Christ au jardin de Gethsémani quelques heures avant de mourir priait, la face contre terre : « Mon Père, non pas ma volonté, mais Ta volonté ».
Amen.
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