28 février 2021

Ombres et lumière

Ombres et lumière

Homélie 2é dimanche du Carême – Année B

 

Frères et Sœurs,

 

« Notre monde est bien noir en ces temps. Il est tourmenté par des mauvaises nouvelles… et particulièrement avec cette pandémie qui n’en finit pas, ce virus qui continue de circuler sans cesse. Près de nous, nos familles, nos amis, nos voisins peut être, peuvent connaitre la maladie, la solitude ou même le deuil. Voilà nos déserts de carême. Pourtant, c’est bien dans cette obscurité que le Seigneur trace un chemin de lumière. Au cœur des nuits de notre monde se lève la lumière du Seigneur. » Ces mots que je reprends sont ceux que j’ai écrit dans le programme de Carême de la paroisse.

 

Ombre et lumière sont bien présentes dans l’Évangile de ce 2é dimanche de Carême. D’abord la lumière éclatante de Jésus transfiguré sur la montagne. « Ses vêtements devinrent resplendissants, d’une blancheur telle que personne sur terre ne peut obtenir une blancheur pareille ». On dirait une pub pour une marque de lessive… divine ! Un autre évangéliste, décrivant lui aussi cette scène, écrit : « son visage devint brillant comme le soleil ». C’est dire la force de cette lumière qui a due éblouir Pierre, Jacques et Jean, témoin de cet évènement si cinématographique. Nous voici devant une révélation, une manifestation divine, une épiphanie ! Jésus se révèle en homme de lumière !

Mais alors que Jésus n’est plus que lumière, entouré des patriarches, voici qu’arrive une nuée. C’est-à-dire un nuage. Ou plutôt sans doute comme un épais brouillard « qui les couvrit de son ombre ». Ces disciples qui viennent de connaitre quelques instants sublimes de lumière, au point que Pierre propose de rester là et de planter la tente, les voici donc à nouveau dans l’ombre, quasiment la nuit. Cette nuit des ombres qu’ils devront affronter de nouveau au jardin de Gethsémani quelques heures avant l’agonie de Jésus. Cette ombre qui verra plusieurs d’entre eux s’enfoncer même dans le sommeil. « Nuit et brouillard ». Certains parmi vous se souviennent peut-être de ce remarquable film documentaire d’Alain RESNAIS qui évoque la Shoah, l’horreur des camps de concentration sous ce titre.

 

Cette ombre, ce brouillard qui est peut-être aussi le nôtre en ce moment comme je l’évoquai au début de cette homélie. Je pense ainsi à ce jeune couple un peu déboussolé que j’ai reçu cette semaine. Ils étaient venus me voir il y a plus d’un an car ils ont le projet de se marier en 2021. Ils étaient si heureux et pressés. Mais cette semaine, ils sont venus m’annoncer qu’ils devaient encore reporter leur union religieuse pour des problèmes de santé… en 2022. Quelle déception pouvait se lire sur leur visage ! J’ai essayé de les rassurer. De leur redonner un peu de lumière.

 

C’est alors que les disciples sont dans cette nuée, alors que leurs yeux ne voient plus rien, qu’ils entendent une voix venue du ciel dire : « Celui-ci est mon Fils bien aimé : écoutez-le. »
Alors que les uns et les autres, comme ces fiancés, nous pouvons nous sentir perdus, déboussolés, dans le brouillard, Dieu nous délivre une bonne nouvelle : en Jésus, mon Fils bien-aimé, je ne vous laisse pas seul. Je suis présent au milieu de vous. Mon Fils bien-aimé est là avec vous, pour vous. Si nous ne sommes sans doute pas témoins d’une transfiguration tous les jours, peut être devons-nous essayer de voir comment le Christ est effectivement présent avec nous. Dans cette eucharistie que nous partageons. Dans nos frères et sœurs. Dans cette belle nature de printemps qui commence passant de la neige au plein soleil. Dieu ne nous laisse pas solitaires.

 

Mais la voix de la nuée ajoute un conseil : « c’est mon fils bien-aimé. Écoutez-le. » Faites marcher vos yeux… et vos oreilles. Par la Bible, Dieu nous parle. Dans le silence et la paix de la prière, Dieu nous parle. Il y a quelques jours, une femme me partageait les malheurs de sa vie…et concluait : « heureusement que j’ai la prière ! » Elle parle à Dieu et je l’espère Il lui répond.

 

Cette semaine, on m’a demandé d’aller parler du Carême aux personnes atteintes d’un handicap de la communauté de l’Olivier de Bruz. J’ai essayé de le faire sans doute bien maladroitement, avec mes mots. A la fin de mon intervention, l’une des personnes accueillies m’a dit : « Très bien. Mais la Croix, c’est dur quand même. » Savoir que Jésus avait souffert sur la croix la rendait triste, à juste titre. Je me suis alors tourné vers la croix qui était accrochée au mur de la chapelle. Et c’est la croix et le Christ qui m’ont sauvé ! Car sur cette croix est peint un Christ glorieux, ressuscitant, avec presque un sourire aux lèvres. En tout cas, un visage paisible. J’ai donc pu expliquer que la souffrance, la tristesse, la noirceur de la Croix et du Golgotha ne peut pas éclipser la lumière et la joie de Pâques. « Le Christ Jésus est mort » écrit Saint Paul. Mais il ajoute aussitôt : « bien plus, il est ressuscité ! ».

 

Le carême est un chemin qui nous invite à traverser l’épreuve de la croix pour nous ouvrir à la vie en abondance de Pâques, de la résurrection. A Saint Pierre, qui veut s’installer, rester sur place, Jésus ordonne de redescendre de la montagne et de poursuivre la mission, guidés par sa Parole. A nous qui avons parfois l’impression d’être dans le brouillard, de ne plus avoir la force d’avancer car nous ne savons pas trop le chemin, le Seigneur nous redit « je suis avec toi tous les jours » et nous invite à nous mettre à l’écoute de sa Parole de Vie et de Lumière.

 

Amen !

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